Une contribution de Séverine Vernet (élue FSU au CHSCT académique)

Protection Sociale : la couverture maladie
1. La Sécurité Sociale
La Sécurité sociale est une composante essentielle du système de protection sociale. Ce dernier repose sur des principes de solidarité et d’universalité qui visent à garantir à chacun et chacune une protection financière contre les aléas de la vie.
Notre modèle de protection sociale offre à chaque assuré une prise en charge financière partielle des soins de santé et un revenu de remplacement, notamment en cas de maladie. Il est fondé sur la solidarité entre malades et non malades : les cotisations (ou la CSG) sont proportionnelles aux revenus mais les prestations sont fournies en fonction des besoins des individus.
Si aujourd’hui, la Sécurité sociale rembourse assez bien les ALD et les dépenses hospitalières, elle ne couvre plus qu’en moyenne 50 % des soins courants (et encore moins pour l’optique, les soins dentaires ou les audio-prothèses).
L’augmentation du « reste à charge » des patients a rendu de plus en plus indispensable le recours à une complémentaire santé (96% de la population est couverte par une complémentaire). Mais nous assistons à un glissement d’un système de moins en moins solidaire et mutualisé (la Sécu) vers un système de plus en plus inégalitaire et segmenté (les complémentaires santé).
Les dépenses :
Elles s’élèveront à 487,4 milliards d’euros en 2017. La branche maladie : près de 160 milliards d’euros de prestations ont été versés en 2015. Les dépenses totales de santé représentaient 11% du PIB en 2015.
Les dépenses augmentent plus fortement que les recettes et donc déficit.
Les recettes :
Les cotisations sociales représentent 57% des recettes du régime général. Une part de ces cotisations est à la charge des entreprises, l’autre à la charge des salariés.
La CSG représente près de 20% des recettes de la Sécurité sociale. Le taux varie : 7,5% pour les salariés, 6,2% pour les demandeurs d’emploi et 6,6% pour les retraités. Un taux réduit ou une exonération est appliquée pour les retraités, les demandeurs d’emploi et les bénéficiaires d’une pension d’invalidité dont les revenus sont inférieurs à certains plafonds.
Autres contributions, impôts et taxes qui financent la Sécurité sociale : par exemple, le prélèvement social perçu sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, les taxes sur les tabacs, les alcools, les produits pharmaceutiques ou encore les prélèvements sur les jeux et les paris.

2. La Complémentaire Santé : La mutualisation des risques, au cœur de la solidarité
La complémentaire santé comprend trois familles : les mutuelles à but non-lucratif avec un fonctionnement démocratique ; les institutions de prévoyance, gérées par les partenaires sociaux, également à but non lucratif ; les sociétés d’assurances, à but lucratif et gérées par des actionnaires.
Par principe, l’activité d’assurance tend à ce que les cotisations payées soient fixées en cohérence avec les risques couverts et les garanties offertes. Appliqué à la santé, cela pourrait signifier que seuls les jeunes, les bien-portants, auraient droit à une couverture complémentaire accessible, du fait, en général, d’un moindre recours aux soins. On parle de « segmentation », lorsqu’un opérateur choisit de créer autant d’offres qu’il existe de catégories au sein de la population, segmentation qui va à l’encontre des mécanismes de solidarité intergénérationnelle
En revanche, les organismes qui créent des espaces de solidarité entre les bien-portants et les malades, les plus jeunes et les plus âgés, les célibataires et les familles nombreuses appliquent un principe dit de « mutualisation des risques ».
Les différents opérateurs (mutuelles, instituts de prévoyance, sociétés d’assurance privées) évoluent dans un univers extrêmement concurrentiel qui ne mutualise pas les risques mais au contraire les segmente. Cette concurrence provoque un mouvement de concentration qui n’épargne pas les mutuelles.
Suite à l’ANI (accord national interprofessionnel) de 2013, la complémentaire d’entreprise est obligatoire depuis le 1er janvier 2016 pour les salariés du privé : financée par l’employeur à hauteur d’au moins 50 %, elle bénéficie d’aides publiques importantes (5 à 6 milliards d’euros).
Pourtant, ces complémentaires assurent des couvertures très différentes selon la taille de l’entreprise, son secteur d’activité et les catégories de salariés.

Par ailleurs, en partant à la retraite, le salarié perd le bénéfice de la complémentaire d’entreprise et doit chercher un contrat individuel dont le coût est bien plus élevé. En éliminant les « mauvais risques » (population plus âgée), cette pratique permet de réduire les tarifs pour les actifs mais elle traduit une bien curieuse conception de la solidarité intergénérationnelle.
Même les mutuelles sont amenées, pour survivre, à adopter les pratiques de leurs concurrents (cotisation modulée selon l’âge et le niveau de prestations dans le cadre d’une offre diversifiée) et à tourner progressivement le dos aux valeurs mutualistes qui fondaient leur existence…
Le référencement (circulaire de la DGAFP de juin 2016, mise en œuvre au 1er juillet 2017):
La seconde phase de référencement dans la Fonction publique d’État ne peut qu’inquiéter. Elle vise à « casser les monopoles » et imposer la libre concurrence. Le choix fait par certains ministères de référencer plusieurs opérateurs à la fois et de multiplier les « options » conduit à une moindre mutualisation des risques, à une régression des droits et à une fragilisation des mutuelles. Répondant favorablement à une injonction de la DGAFP, tous les ministères (sauf celui des finances) ont ainsi exclu la couverture de la perte d’autonomie des offres référencées. La couverture en option du risque de perte d’autonomie sera donc considérablement plus coûteuse. Découplage assurance santé et volet « prévoyance ».

3. Contexte politique de la campagne présidentielle
Diverses propositions émergent :
une assurance santé plus égalitaire sur le modèle d’une Sécurité Sociale à 100%, qui prendrait donc en charge l’intégralité des soins médicaux prescrits. Serait alors réduite ou supprimée la part des mutuelles dans le remboursement et leur rôle serait alors centré sur des missions de prévention et d’offres de soins ;
des niveaux et des modalités de financement qui divergent (contribution par l’impôt vs cotisations sociales) ;
des visions différentes de l’organisation du système de soins dans le pays (médecine de ville / hôpital) ;
sur les tarifs (dépassements d’honoraires, prix des médicaments…).

4. De l’urgente nécessité à intervenir dans le débat public
Le SNES et la FSU ont un mandat de reconquête d’une sécurité sociale de haut niveau, ce qui suppose de mobiliser des recettes supplémentaires dans le cadre d’une autre politique de l’emploi, des salaires et de redistribution des richesses.
Dans ce cadre, ils se sont prononcés depuis plusieurs congrès en faveur d’une politique ambitieuse de santé publique visant notamment à développer la prévention à tous les âges de la vie avec un budget conséquent, à revenir sur les régressions imposées (déremboursements, franchises, forfait hospitalier) et à couvrir tous les besoins en tendant vers un taux de remboursement de 100 % des soins médicaux prescrits.